Bye

Je n’ai pas eu la force de regarder BYE. Je voulais le faire, je voulais me montrer fort mais je n’ai pas pu. Ne considérez pas que je l’ai regardé, je ne l’ai pas fait. Cependant je l’ai joué plusieurs fois. En 25 ans j’ai été suicidaire pendant 15 ans. Par périodes de 2 à 5 ans.

Je suis maintenant sous médication, suivi de près par un psychiatre, mon septième, celui qui me suis depuis 1992. Combien y a-t-il de raisons de se suicider, ou de vouloir le faire? Des milliers. Qu’est-ce qui fait passer à l’acte? Des douzaines de raisons. J’y ai échappé, bien souvent au prix d’une torpeur médicamentée à outrance. Zombie ou hilare, amorti ou excité.

Le but de mon propos est celui-ci: quoi ne pas dire, ne surtout pas dire. Je vais prendre l’exemple de l’aide sociale pour vous expliquer. Il y a des gens qui trichent l’aide sociale, comme l’impôt, et même certains qui trichent les 2 en même temps. Mais c’est un minorité. Même très minoritaire. Beaucoup ne pense que ce n’est que ça. Mais en vérité c’est autre.

Quelle correspondance avec le suicide? Il y a des gens qui effectivement se servent de ce stratagème pour attirer l’attention. Mais très peu le font. Presque tous, j’en suis certain, ont eu un moment où ils se sont dits; la vie vaut-elle la peine d’être vécue? Sommes-nous dans la vraie vie? Toutes sortes d’hésitations à vivre. Mais ce n’est qu’hésitation pour la plupart. C’est ce moment de vie qui déculpabilise et déresponsabilise beaucoup de gens. “Ah! Ça m’est déjà arrivé moi aussi. Donne-toi un bon coup de pied, tu vas voir ¸a va aller mieux.”

Une ou deux hésitations ne sont pas grave. Mais, la durée et la répétition de ces hésitations devraient nous donner à penser que ce ne sont pas que des hésitations. Le mal de vivre s’installe de façon pernicieuse, lentement, insidieusement. Le temps fait que l’on s’habitue à ces pensées morbides. Elles sont courantes et on n’en parle pas. Pourquoi? Parler de quoi? C’et ça la vie, c’est tout.

Bye est une façon civilisée de dire quelque chose de précis. Bye! À la prochaine, quoiqu’il arrive. Mais le drame n’est pas la personne qui se suicide. Elle a agit conformément à ses pensées. Le drame c’est ceux qui survivent. Pourquoi? Égocentrisme. Souvent, on pense que les autres agissent en fonction de nous. Qu’est-ce que je n’ai pas vu? Aurais-je dû faire quelque chose? Pourquoi n’a-t-il rien dit? et toutes les autres questions qui ramènent à vous.

Ayant passé par là de maintes fois, je peux vous affirmer que vous ne faites pas partie des raisons qui motivent les pensées et les gestes. Dans ces moments on pense à soi et à l’effet que l’on produit sur le monde. Pour parler honnêtement de ce sujet il faut être très fort. Force qui n’est pas disponible dans ces moments où l’on est seul.  Même près de la mort, les gens veulent que l’on pense à eux. Mais eux pensent-ils à nous? La pire chose que vous pouvez dire à quelqu’un qui pense au suicide est de penser aux autres. Vous venez de leur dire en pleine face qu’ils ne sont pas aussi importants que les autres. Pense aux autres. Qui pense à moi? se dit immédiatement la personne. Ou encore, je ne mérite pas de vivre, je suis une cause de problèmes et 1000 autres raisons.

Si vous ne savez que dire, ne dites rien. Surtout ne niez pas la réalité de cette personne. Soyez là et attendez. Elle finira bien par parler. Toute parole prononcée par la personne est parole d’Évangile, ne niez pas. Demandez des explications, dites que vous voulez comprendre, ne mettez pas des paroles dans sa bouche. C’est ainsi que je me suis comporté quand j’ai eu à traiter avec des personnes, oui des personnes, en situation de détresse. Ce sont des personnes, pas des suicidaires. Elles ont une vision du monde qui est la leur. Cherchez à comprendre cette vision. Vous n’avez pas à l’accepter mais vous devez l’écouter. Si la personne parle vous avez gagné.

Aujourd’hui ces pensées sombres ne sont pas venues me troubler depuis des année. Pourquoi? Un ensemble de raisons. J’ai fait la paix avec la mort, je l’attends. Je ne la souhaite plus, elle ne m’appelle plus, mais mes pré-arrangements sont faits et payés. Mes dispositions sont prises. Là j’ai pensé aux autres. Le peu d’argent qui résultera suite à mon décès, payez-vous un beau party, pensez à tous les bons moments qu’on a vécu et dites-vous que j’ai fait de mon mieux.

Je ne peux penser à plus pour les autres que de ne pas être une source de trouble. Et je continue à vivre pour moi. C’est ce que vous faites tous, et les regrets ne sont que ceux des moments où l’on n’a pas su être avec les autres, dans la vraie vie. Celle entre la naissance et la mort.

Bertrand  (@BDmoi)

 

Laisser un commentaire

Votre adresse courriel ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire le pourriel. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.