Il est des gens pour penser que la société réagit comme un organisme vivant. Tel un banc de poisson qui semble évoluer comme un seul être. La technique du banc de poisson est de se trouver au milieu pour ne pas être mangé par un prédateur. Il n’est pas dit que ça fonctionne pour l’individu mais ça fonctionne pour l’espèce.
Qu’est-ce qui régit le comportement individuel? Nous sommes, chacun, un mélange de traits de personnalité innés et acquis. Il est des traits familiaux, souvent acquis dès le jeune âge(2-5 ans) non par ce que l’on nous a dit mais par ce que l’on a observé. On dit en anglais:”Monkey see monkey do”. On a l’inverse en Français, de manière sarcastique, “Faites ce que je dis, pas ce que je fais”.
Pourquoi subissons-nous tout ce décrochage scolaire, à tous les niveaux? Il y a de multiples raisons et chacune ne s’applique qu’à quelques individus. La somme des 25% et plus de décrochage scolaire, avant la fin du secondaire, est comme vouloir expliquer le comportement spécifique du poisson dans le banc.
Pourquoi un jeune laisse tomber l’école? Tant de raisons l’expliquent. Mais, à mon point de vue, il y a une chose qui me semble de première importance. C’est le peu de projection dans le temps que font la plupart des gens. On vit d’une paie à l’autre, on ne se pose pas de questions sur ce qu’on ferait si… On réagit en fin de compte quand on n’a plus vraiment le choix. Voilà ce que beaucoup montrent à leurs jeunes. Les jeunes (20-25%) ne sont motivés par aucune habitude démontrée par leurs aînés.
L’exemple du cultivateur à Longueuil, celui qui a déversé du purin à l’union des producteurs agricoles, est un cas de désespoir. Pas pour lui, pour ceux qui voudraient faire de l’agriculture familiale. Il assume son geste et n’a trouvé que ce moyen pour alerter les gens sur la situation des agriculteurs. Quel rapport avec le décrochage? Pour un agriculteur motivé pour essayer de changer la situation, pour alerter la population il y en a combien qui ont baissé les bras?
Dans la vie, j’en suis persuadé, une personne va agir (être motivée) si et seulement si elle voit une porte de sortie, en identifie une stratégie pour faire valoir son point et aussi une des 2 choses suivantes: elle n’a rien à perdre ou a tout à gagner.
La motivation, qui manque à beaucoup, ne vient pas d’encouragements “vas-y t’es capable” mais de visions que l’on communique aux autres. Exemple: quand on fait voir à une personne, un moyen suffisamment crédible, pour elle, de sortir des dettes dans un laps de temps raisonnable, elle réagit souvent dans ce sens. Pas tous mais beaucoup.
Pour faire réagir la masse des décrocheurs, il faut cesser de se battre sur le comment et vraiment plancher sur le pourquoi. Une relation d’humains à humains est la clé pour partager les visions. C’est là d’après moi qu’on manque le plus le bateau. Pas que les gens ne soient pas bon? Mais que les gens sont dépassés, par des normes inhumaines.
On essaie de développer des bâtiments et des organisations pour inciter les jeunes à persévérer. Il faut au contraire humaniser, rendre à des dimensions humaines, les lieux et les relations entre les individus. Les outils informatiques permettent de rapprocher les humains en mettant les connaissances au bout des doigts, et bientôt de la parole.
J’ai appris, à l’université des principes d’administration. Je suis sorti de l’Université sans projet d’entreprise. Je savais que je n’étais pas prêt. J’ai alors passé 8 ans à travailler dans des entreprises pour parfaire mon éducation en la confrontant avec la réalité. Ce n’est qu’après, que j’ai trouvé le projet qui m’intéressait. Et même pire, que j’en ai trouvé plusieurs.
On demande, aujourd’hui, à des jeunes qui ne voient rien de réjouissant dans leur avenir, de mettre l’épaule à la roue. Pourquoi le feraient-ils? Ce qu’ils voient est contrarié par ce que l’on dit. Qu’est-ce qu’ils vont croire? Leurs yeux ou nos paroles. Tout passe par la vision quand on parle de motivation. J’ai souvent expérimenté et presque toujours ça s’est avéré. Donc la solution au décrochage passerait par l’empathie plus que par la contrainte.
Bertrand (@BDmoi)